Archives départementales de Lot-et-Garonne - Lot-et-Garonnais et la Grande Guerre

La victoire et le deuil

Le 11 novembre 1918, à 11 heures du matin, l’Allemagne signe avec la France, l’Angleterre et les États-Unis l’armistice. Après quatre années d’affrontements meurtriers les combats cessent enfin.

 

Partout la joie explose chez les vainqueurs : joie chargée d’émotion chez les soldats au front ; joie délirante chez les civils de l’arrière. Fêtes collectives, défilés militaires, parades sportives, feux d’artifice sont organisés un peu partout. Cette même liesse éclate encore dans les fêtes de la Victoire célébrées le 14 juillet 1919 à Paris et dans d’autres villes en province.

 

Cette joie ne masque cependant pas l’étendue de la tristesse et du deuil. Des familles entières sont détruites. On ne compte plus les orphelins, les parents qui ont perdu un fils, un frère. Les veuves, drapées de noir, accablées mais dignes, font partie du paysage désormais. Les victimes directes du conflit – blessés, mutilés – auxquelles s’ajoutent les prisonniers ont du mal à retrouver une place, une vie décente dans ce monde qu’ils ont quitté depuis quatre ans et qui s’est transformé. Ils dénoncent leur situation dans les associations et les journaux qu’ils créent.

 

Partout s’ébauche un lent travail de deuil. Ceux qui ont combattu veulent témoigner pour exorciser la guerre et son cortège de souffrances et d’horreurs. Mais aussi parce qu’ils s’estiment seuls en droit d’écrire l’histoire de ce conflit.
On veut également célébrer l’héroïsme des soldats morts pour la France en dressant dans chaque village, dans chaque ville un monument aux morts. 36 000 furent ainsi édifiés en France dans l’entre-deux-guerres. Ces monuments, marquant le deuil et la souffrance, deviennent à partir du 11 novembre 1920 le rassemblement de tous ceux, anciens poilus ou civils, qui espèrent que cette guerre sera vraiment « la der des ders ».

 

L’armistice du 11 novembre 1918

vu par Victor Capot, adjudant au 9e RI, « Souvenirs et impression » n° 14. Carnet manuscrit.

A. D. de Lot-et-Garonne, 1 J 814/14

« Lundi 11 novembre !!!...Á 10h35 nous apprenons par le téléphone chez M. Prêt que les hostilités cessent aujourd’hui 11 heures ! L’armistice est signé. ….Le soir retraite au flambeau (sic) et feux d’artifice  entre Evry et Cuy (Yonne) – (superbe cuite !)».

L’armistice à Agen,

Le Petit Bleu du mardi 12 novembre 1918. Imprimé.

A. D. de Lot-et-Garonne, 208 JX 9

« À huit heures, la place de la mairie était noire de monde….le concert de La Lyre agenaise a obtenu un grand succès… ».

L’armistice à Toulouse

raconté par Jean Millon d’Ainval à son père, 13 novembre 1918. Lettre manuscrite, 4 p.

A. D. de Lot-et-Garonne, 13 J 230

Réformé en 1917 après avoir été gravement blessé sur le Front, Jean entre au grand séminaire de Toulouse où il se trouve le 11 novembre 1918 : « En l’honneur de ce grand jour nous avons reçu hier la permission de sortir en ville et de nous promener sur les boulevards afin de jouir des manifestations de joie et d’enthousiasme patriotiques ».

L’armistice à Périgueux

dans les « Notes personnelles » de Maurice Millon d’Ainval, 1er octobre au 31 décembre 1918. Carnet manuscrit.

A. D. de Lot-et-Garonne, 13 J 233

« Tous les visages radieux sur les allées. Une foule compacte parlant, riant, se saluant avec le sourire aux lèvres : puis des groupes de soldats, - d’autres d’enfants avec drapeaux, - trompettes, tambours. Enfin le délire populaire ».

Assiette

commémorant l’armistice du 11 novembre 1918, produite par la manufacture M. BUP Pollmann de Nimègue. Faïence.

Collection privée

Décorée des symboles de la paix et de la victoire, cette assiette porte les noms des signataires de l’armistice pour la France, l’Angleterre, les Etats-Unis et l’Allemagne.

Corsage brodé

des drapeaux français et américains sommés d’un soleil et soulignés du millésime 1918.

Collection Jean Chazottes

Retour à Agen du 18e régiment

d’artillerie de campagne, passant boulevard Carnot, 1919. Carte postale.

Collection privée

Parti d'Agen en août 1914, ce régiment combattit à la frontière franco-belge, sur la Marne, en Lorraine, en Champagne, à Verdun. Il venait de participer à la prise de Guise (Aisne) quand l'armistice fut signé.

Retour à Agen du 9e régiment

d’infanterie, par A. Balistai, s. d. [1919]. Trois tirages photographiques noir et blanc par Balistai.

Collection Lafon

On voit successivement le général Garbit célébrant les exploits de ce régiment devant la gare, le défilé boulevard de la République et, enfin, la foule sur le boulevard.

Les fêtes de la Victoire à Agen,

Le Petit Bleu du 14-15 juillet 1919. Imprimé.

A. D. de Lot-et-Garonne, 208 Jx 11

Elles commencèrent par une cérémonie au cimetière pour rendre hommage aux morts, se poursuivirent l’après-midi par des jeux place du XIV juillet pour s’achever le soir par une retraite aux flambeaux suivie d’un concert de La Lyre agenaise et un bal champêtre. Le lendemain eurent lieu un défilé militaire et une fête athlétique.

Buste de poilu

par le sculpteur Henri Laffite, [1919]. Plâtre

Collection privée

Ce buste fut réalisé pour figurer aux fêtes de la Victoire à Condom en 1919.

« Le pèlerinage des mères, des veuves et des orphelins,

apportant des fleurs sur les degrés du Cénotaphe », L’Illustration, 19-26 juillet 1919. Imprimé.

A. D. de Lot-et-Garonne, 9 Ill 9

Ce cénotaphe fut spécialement dressé à l’occasion des fêtes de la Victoire à Paris les 13 et 14 juillet 1919. Installé sous l’Arc de triomphe pour la soirée du 13 consacrée à la mémoire des morts, il fut déplacé à l’angle de l’Étoile et des Champs-Élysées, le lendemain, pour le défilé des vainqueurs.

État nominatif des décorés

de la médaille militaire appartenant au 18e régiment d’artillerie, 1er décembre 1920. 1 p. manuscrite.

A. D. de Lot-et-Garonne, 1 M 656

Les décorations participent à ce désir d’exalter l’héroïsme  au service de la patrie et d’aider les poilus comme les veuves de guerre à supporter leur situation au retour de la paix

Lettres de concession de la Légion d’honneur

aux officiers et hommes de troupe du 9e régiment d’infanterie. Bordereau, 2 p. manuscrites.

A. D. de Lot-et-Garonne, 1 M 656

Médailles militaires de la Grande Guerre :

insigne de chevalier de la Légion d’honneur, Médaille militaire, Croix de guerre..

A. D. de Lot-et-Garonne, Mu et collection privée

La Grande Guerre vécue, racontée illustrée par les combattants,

parue en 1922, Paris, Librairie Aristide Guillet. Prospectus, 16 p. imprimées + deux gravures reproduites.

A. D. de Lot-et-Garonne, 125 J

Confiée à l’Association des écrivains combattants, la rédaction de cet ouvrage a pour but de montrer « la grande misère des tranchées…l’espoir, les découragements, les audaces, l’héroïsme… ». Il est précisé que chaque souscripteur du volume aura droit à une reproduction de sa photographie ou de celle d’un mort au champ d’honneur.

Les héroïques soldats de France,

série vendue au profit de la Cocarde du souvenir. Pochette imprimée contenant 8 reproductions en couleur.

A. D. de Lot-et-Garonne, 1 J 812

Le Mutilé.

Organe officiel de l’Association agenaise des Mutilés, Réformés, Auxiliaires, Anciens Combattants de la Grande Guerre (1914-1919).., n° 2 (septembre 1920). Imprimé, 4 p.

A. D. de Lot-et-Garonne, 334 Bu 1

Ces publications associatives fleurissent après l’armistice, les « gueules cassées »  et les blessés ressentant la nécessité de s’unir face au monde civil qui n’a pas connu les tranchées.

La voix du poilu,

organe officiel de la Fédération Départementale des Associations Lot-et-Garonnaises des Mutilés, Blessés, Anciens Combattants…, n° 18 (3e année), novembre 1918. Imprimé, 4 p.

A. D. de Lot-et-Garonne, 337 Bu 1

Outre la défense des mutilés et leur réinsertion professionnelle, cette publication prend en main la cause des veuves et des orphelins de guerre.

Un groupe de grands mutilés de la Fédération nationale.

Carte postale en noir et blanc ; 12 x 9,5 cm.

Collection Catrou

Cette carte qui présente de grands mutilés de guerre (amputés, aveugle) dénonce la rente allouée « de 875 Fr. par an !!! ».

Fanion de l’Union nationale des combattants.

Bannière en tissu, composée de trois bandes bleu, blanc, rouge portant les trois lettres UNC.

A. D. de Lot-et-Garonne, 125 J

L’Union des combattants fut créée par Georges Clemenceau et Daniel Brottier pour développer entre ceux qui ont défendu la France des liens de solidarité et assurer la défense de leurs intérêts avec pour devise « Unis comme au front ». Ce fanion témoigne de l’esprit du front qui a survécu au-delà de la fin de la Grande Guerre.

Catalogue de monuments aux morts

des Marbreries générales, Paris, 1920. Imprimé, 6 p.

A. D. de Lot-et-Garonne, 4 T 3

De nombreuses communes choisissaient de s’adresser à des entreprises qui fabriquaient en série ces monuments commémoratifs plutôt que de faire construire leur monument par un entrepreneur local ou de choisir un modèle sur concours

Projet du monument aux morts de Lavardac

approuvé le 28 mars 1922. Élévation à la mine de plomb et collage, 1 plan..

A. D. de Lot-et-Garonne, 2 O 143/27

Sur un piédestal accosté de deux socles latéraux, statue en marbre casquée, portant lance et bouclier, qui se recueille dans le souvenir de ses morts (inscription). La statue est l’œuvre de Daniel Bacqué.

Projet du monument aux morts de Saint-Caprais-de-Lerm

approuvé le 20 mars 1928. Élévation en couleur, 1 plan.

A. D. de Lot-et-Garonne, E dépôt Saint-Caprais-de-Lerm 1 M 3

Obélisque coiffé d’une urne et décoré d’une composition avec casque, drapeau et palme.

Monument aux morts de Montpezat-d’Agenais

dressé par le sculpteur Georges Vivent et approuvé le 7 novembre 1921. Élévation sur cyanope à trait blanc sur fond bleu, 1 plan. avec signature.

A. D. de Lot-et-Garonne, 2 O 190/18

Obélisque du sommet duquel pend la Croix de Guerre. S’en détache un soldat casqué, les deux mains appuyées sur un fusil.

Monument commémoratif aux enfants de Blanquefort-sur-Briolance,

1922. Élévations de face et de profil sur papier, 1 plan.

A. D. de Lot-et-Garonne, 2 O 29/17

Femme en pied tenant un drapeau avec, à ses pieds, une branche de chêne et un rameau d’olivier. Ce monument provient de l’entreprise Rombaux-Roland et fils de Jeumont dans le Nord.

Projet du monument aux morts d’Astaffort,

approuvé le 11 juillet 1925. Élévation de face et de profil sur papier, 1 plan.

A. D. de Lot-et-Garonne, 2 O 15/14

Entre deux plaques sur lesquelles sont gravés les noms des morts de 14-18, une femme debout, courbée par la peine, un bouquet de fleurs à la main.

Monument commémoratif de Saint-Jean–de-Thurac

approuvé le 22 avril 1924. Plan, élévation et vue en perspective, encre sur papier, 1 plan.

A. D. de Lot-et-Garonne, 2 O Saint-Jean-de-Thurac

Obélisque sur le socle duquel sont inscrits les noms des morts de 14-18, entouré de six obus reliés par une chaîne. Saint-Jean-de-Thurac est l’un des villages les plus touchés par la Grande Guerre avec 24 morts pour une population de 331 habitants en 1911. Il partage ce triste privilège avec Saint-Pardoux-du-Breuil (32 morts pour 364 habitants), Saint-Nicolas-de-la-Balerme (24 morts pour 307 habitants), Taillebourg (18 morts pour 242 habitants) et Douzains (26 morts pour 374 habitants).

Monument aux morts dit de la Victoire,

par Antoine Bourlange (1872-1951), 1923. Maquette en plâtre ; haut. : 157 cm ; embase à pans coupés

Musée de Gajac à Villeneuve-sur-Lot

Victoire ailée brandissant d’une main un casque allemand à pointe et de l’autre main un rameau d’olivier (aujourd’hui disparu). L’original a été remonté à Bias avec les quatre panneaux qui décoraient le socle en 1999. Le sculpteur, originaire de Villeneuve-sur-Lot et élève de Falguières, exécuta de nombreux autres statues et bustes ainsi que plusieurs monuments aux morts à Monclar-d’Agenais, Penne-d’Agenais, Sainte-Livrade-sur-Lot et Marmande. Cette dernière ville lui commanda également un monument commémoratif des proscrits de 1852.

Panneaux du monument aux morts dit de la Victoire.

Maquettes en plâtre.

Musée de Gajac à Villeneuve-sur-Lot

Les deux panneaux ici présentés (il en existe quatre) et qui ornent le socle de la victoire ailée représentent le retour d’un poilu dans son foyer et une allégorie de la victoire. Ce socle a été dessiné par l’architecte Gaston Rapin.

Monument aux morts de la Grande Guerre d’Agen,

par Daniel Bacqué (1874-1947), 1923. Plaque de verre par A. Balistai.

A. D. de Lot-et-Garonne, 30 Fi 1075

Le groupe sculpté central représente une femme en pied, voilée, tête baissée, portant une épée pointe en bas et figée dans la douleur. Elle surmonte une crypte dans laquelle sont gravés les noms des morts. De part et d’autre, le socle est orné de deux groupes de poilus : à gauche un groupe de soldats défendant une position, à droite cortège fait à un blessé.

Le sculpteur, Daniel Bacqué, originaire de Vianne, fut l’élève de Bourdelle et sculpta également les monuments commémoratifs d’Aiguillon, de Vianne et de Lavardac

Monument aux morts d’Astaffort,

1925. Plaque de verre par A. Balistai.

A. D. de Lot-et-Garonne, 30 Fi 1069

Monument aux morts de Prayssas,

1923. Plaque de verre par A. Balistai, 12 x 9 cm.

A. D. de Lot-et-Garonne, 30 Fi 1066 (agrandissement)

Obélisque cantonné de quatre obus et sommé d’une urne funéraire. Sur la face principale une épée, deux drapeaux, une couronne de laurier et deux casques sculptés en relief.

Monument aux morts de Laroque-Timbaut.

Plaque de verre par A. Balistai.

A. D. de Lot-et-Garonne, 30 Fi 1068 (agrandissement)

Monument aux morts de Lavardac,

1923. Plaque de verre par A. Balistai, 12 x 9 cm

A. D. de Lot-et-Garonne, 30 Fi 1067

Monument aux morts de Nérac,

1923. Plaque de verre par A. Balistai.

A. D. de Lot-et-Garonne, 30 Fi 1072

Soldat debout sculpté par Auguste Guénot.

Monument aux morts de Mézin

par Daniel Bacqué, 1925. Plaque de verre par A. Balistai.

A. D. de Lot-et-Garonne, 30 Fi 1070

Allégorie de la France debout, armée d’une lance et d’un bouclier.

Fiche signalétique de Louis Lacoste

dans le registre matricule militaire de la classe 1918. Registre manuscrit.

A. D. de Lot-et-Garonne, 1 R 705

Né le 11 novembre 1898 à Meilhan-sur-Garonne, Louis Lacoste, alors étudiant, s’engage le 18 janvier 1917 dans le 18e régiment d’artillerie de campagne. Devenu radio auxiliaire, il suit les cours des élèves aspirants d’artillerie et est promu sous-lieutenant en 1919. En 1920 il quitte l’armée et devient ingénieur aéronautique. Il mourut le 19 juillet 2000 dans les Pyrénées-Atlantiques.

Fiche signalétique de Pierre Serres

dans le registre matricule militaire de la classe 1917. Registre manuscrit.

A. D. de Lot-et-Garonne, 1 R 700

Né le 1er juillet 1897 à Boudy-de-Beauregard, Pierre Serres, valet de chambre, s’engage pour quatre ans le 15 novembre 1915 et est incorporé au 9e Dragons. Il participe à la bataille de la Marne, au Chemin des Dames. Nommé brigadier en 1919, il assiste au défilé de la victoire à Paris le 14 juillet avant d’être mis en congé illimité, le 17 novembre 1919. Revenu dans son village dont il fut maire de 1944 à 1953, il mourut le 21 juillet 2000. Avec lui meurt le dernier poilu lot-et-garonnais.
Site internet du Conseil général du Lot et Garonne